RFI 🔵 Syrie: à Jaramana, près de Damas, les habitants prennent en main la crise des déchets
Depuis la chute de Bachar el-Assad le 8 décembre 2024, les autorités locales ont démissionné et les affaires de la ville ont été partiellement prises en main par un réseau de bénévoles. Des habitants s’organisent pour débarrasser des centaines de tonnes de déchets accumulés depuis des semaines.
Publié le :
3 min
Publicité
De notre envoyée spéciale à Jaramana
Dans le quartier des « jardins » à Jaramana, des familles ont déployé sur le sol des tapis et des couvertures sous un soleil radieux. Mais ce sont des familles de déplacés et le terrain est aussi occupé par des monceaux d’ordures. Un résumé de la situation de crise que la ville traverse depuis le 8 décembre dernier. « On ne sait pas combien de temps la communauté pourra continuer à gérer ça ! », s’exclame Chadi Daou, membre du conseil municipal démissionnaire.
Faute d’assemblée locale, des bénévoles, dont des autorités spirituelles druzes ont pris les devants depuis la chute de Bachar el-Assad en créant un « comité civil » pour la gestion de la cité. « Ils ont payé de leurs poches. Ils ont géré cette crise et le reste depuis le 8 décembre », explique Chadi Daou. Un habitant a prêté le terrain le temps de rassembler les fonds pour acheminer les ordures dans la décharge principale située à environ 25 kilomètres de Jaramana.
« Pendant ce temps, mes chantiers n’avancent pas. Il faut une réponse urgente. Même si on peut supporter, on arrive aux limites de ce qu’on peut faire », s’exclame Firas Qareish, un entrepreneur du bâtiment qui a fourni trois camions et un tractopelle. Un geste gracieux conditionné à l’achat de carburants qui fait cruellement défaut. Seuls 1 600 litres de carburant ont été assurés pour la semaine, alors qu’il en faudrait beaucoup plus. Environ 80 % des véhicules de transports des déchets de la ville sont en panne et 800 tonnes de déchets se sont accumulées depuis un mois.
Un manque de moyens pour cette ville qui compterait plus de deux millions de personnes
D’après ces habitants, Jaramana compterait plus de deux millions d’âmes, dont les vagues de déplacés des zones touchées par la guerre. Une « explosion démographique » jamais prise en compte par aucune autorité. « On appelle ça une équation insoluble » souffle Salem Al Maghrebi, un autre entrepreneur et membre du comité civil. « On le disait aux anciennes autorités : Jaramana ne peut pas continuer à recevoir les moyens correspondant à une ville de 100 000 habitants, alors qu’elle est une fois et demie plus peuplée qu’Idlib », s’exclame l’ingénieur de formation.
Les anciens dirigeants d’Idlib, désormais au pouvoir à Damas se montrent-ils attentifs au sort de Jaramana ? Une rencontre a eu lieu avec un responsable du ministère de l’Administration locale, mais sans effets pour l’heure. Pourtant, les efforts entrepris par les bénévoles de la ville devraient être soutenus et dupliqués partout en Syrie, estiment les habitants interrogés.
Pour l’heure, faute de budget, les salaires non plus ne sont pas versés, ce qui rend la situation chaque jour plus difficile.
À lire aussiOù en est la Syrie un mois après la chute de Bachar el-Assad?