LE FIGARO 🔵 L’association d’aide aux migrants Utopia 56 ciblée par la justice, pour diffusion de «fausses informations»
Le collectif pro-migrants, qui défie régulièrement l’État, est soupçonné d’avoir diffusé de fausses informations aux autorités pour provoquer «l’intervention inutile des secours».
«Utopia 56 est un collectif qui pousse au désordre républicain», confiait il y a quelques années un policier chevronné au Figaro . Aujourd’hui, l’association pro-migrants est visée par plusieurs enquêtes pénales, diligentées par le parquet de Boulogne-sur-Mer, de Rennes et de Saint-Omer, a-t-on appris ce vendredi 29 novembre, confirmant une information du Monde .
Auprès du Figaro, le parquet de Boulogne-sur-Mer a confirmé avoir ouvert une enquête pénale mettant en cause des membres de l’association, «sur des faits qualifiés de communication ou divulgation d’une fausse information dans le but de faire croire à un sinistre de nature à provoquer l’intervention inutile des secours». En cause, deux signalements parvenus au ministère public et émis en juillet 2023 et septembre 2023 par le préfet maritime de la Manche et de la mer du Nord, qui dénonçait à l’époque plusieurs appels téléphoniques de l’association.
Lors d’une conférence de presse en février dernier, l’ancien préfet maritime, Marc Véran, avait déjà évoqué des «signalements» et dénoncé des «associations» qui font «le jeu des passeurs», en contactant le Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (Cross) pour les avertir de «faux départs» ou de «fausses urgences». «On est obligé d’envoyer des secours là où il n’y a rien du tout, avait-il assuré. Ça leurre les forces de sécurité.»
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«Le jeu des passeurs»
Les parquets de Rennes et Saint-Omer ont également ouvert des enquêtes à l’encontre d’Utopia 56. Celle de Rennes cible la fausse information d’un bénévole, qui aurait appelé les secours la nuit du 4 août pour les avertir que des migrants subissaient des violences de la part de policiers, et qu’un enfant était en danger.
Quant Ă celle du parquet de Saint-Omer, ouverte pour diffamation, elle viserait une publication sur X d’Utopia 56, qui affirmait en avril dernier que «des policiers (avaient) mis feu Ă une embarcation de personnes exilĂ©es qui tentaient de rejoindre le Royaume-Uni». Le prĂ©fet du Pas-de-Calais avait rĂ©pondu au tweet, Ă©crivant: «C’est faux. La nuit du 7 au 8 avril, une rixe impliquant 80 migrants a eu lieu Ă Oye Plage au moment de l’embarquement organisĂ© par les passeurs (…) Ces personnes ont pris violemment Ă partie les gendarmes par des jets de projectiles. Par dĂ©pit, elles ont ensuite incendiĂ© leur propre embarcation.»
Ce n’est pas la première fois que la préfecture du Pas-de-Calais contredit publiquement Utopia 56 sur les réseaux sociaux. En mai 2023 déjà , le compte de l’institution expliquait que le gazage de 50 personnes sur une plage du Pas-de-Calais, comme relaté par l’association, était «faux». «Voici la vérité des faits par ceux qui y étaient vraiment», avait cinglé la préfecture.
«Attendons que la justice fasse son travail»
Joint par Le Figaro, Yann Manzi, fondateur de l’association, déclare avoir pris connaissance de ces poursuites pénales. «Attendons que la justice fasse son travail. (Les enquêtes concernent) des appels au secours qui n’ont soi-disant pas abouti», assure-t-il. «Nous, on fait notre boulot sur le littoral, on aide les gens sur place», affirme-t-il aussi.
CrĂ©Ă©e après la diffusion des images de la mort du petit Aylan en 2015, Utopia 56 compte aujourd’hui quelque 18.000 «adhĂ©rent.es» et mobilise «200 bĂ©nĂ©voles chaque jour et chaque nuit», explique-t-elle sur son site. Officiellement, le collectif organise des collectes et distributions de nourriture ou de vĂŞtements, donne des cours de français…
Mais d’après une note du renseignement citée par Valeurs Actuelles en 2021, l’association afficherait une «proximité avec les milieux contestataires de l’ultragauche», et certains de ses membres pourraient avoir des «liens avec les passeurs». «Une rhétorique antisystème offensive est entretenue par des rapports de force afin de stigmatiser les forces de l’ordre et remettre en cause l’autorité de l’État», affirmerait la note.
L’association a effectivement porté plainte à plusieurs reprises contre les autorités, notamment en février dernier pour «homicide involontaire» et «omission de porter secours» à l’encontre du directeur du Cross Gris-Nez, dans le Pas-de-Calais, après la mort de quatre personnes qui tentaient de rejoindre l’Angleterre le 14 décembre 2022. Leur embarcation pneumatique, qui transportait des dizaines de personnes, avait fait naufrage. L’association assure avoir prévenu les autorités en vain.