20 MINUTES 🔵 Les sujets qui fâchent du futur plan loup, prévu pour début 2024
La réunion était annoncée comme à risque. Ça n’a pas loupé. Ce lundi midi, plusieurs associations écologistes ont claqué la porte de la réunion à huis clos du Groupe national loup (GNL) à Lyon. Le gouvernement venait présenter à ce comité – composé aussi d’élus, d’éleveurs, de chasseurs, etc. – les grandes orientations de son plan loup 2024-2029, qui doit entrer en vigueur le 1er janvier prochain.
Ce document, mis à jour tous les quatre ans, élabore la méthode pour assurer la gestion de l’espèce en France, où elle a fait son retour, naturellement, au début des années 1990. Trente ans plus tard, le nombre de loups en France est estimé à 1.104 individus, selon la dernière évaluation communiquée le 8 septembre dernier par la préfecture de la région Auvergne-Rhône-Alpes, en charge de la préparation du plan loup. Cette estimation a été revue à la hausse par rapport à une première estimation en juillet dernier, qui recensait 906 individus sur le territoire.
Un plan loup qui acte le réexamen du statut du canidé en France
Ce retour du loup est salué par les associations environnementales, qui y voient une rare bonne nouvelle sur le front de la biodiversité. Mais il bouleverse aussi le travail des éleveurs, qui ont recensé 12.000 bêtes tuées l’an dernier encore.
C’est dire, donc, les tensions autour du plan loup. Ce lundi, le gouvernement n’en a présenté que les grandes orientations, à défaut de la version définitive. Mais les associations écologistes pâlissent déjà , dénonçant un plan très déséquilibré pour le loup. Il ambitionne d’instaurer un nouvel « équilibre », entre loup et pastoralisme, l’exécutif estimant que le premier « n’est plus en danger d’extinction » tandis qu'(…) il y a un danger réel de disparition du pastoralisme ».
Un plan qui fait hurler les associations
Le principal sujet qui fâche porte sur le statut même du loup en France, aujourd’hui espèce strictement protégée. « Le texte acte la nécessité de réexaminer le statut du loup, avec l’éventualité de le faire passer à espèce protégée seulement », indique Claude Font, responsable loups de la Fédération nationale ovine et présent à la réunion de ce lundi, côté éleveur. Il se félicite de cette mesure, qui permettrait possiblement d’augmenter le taux de prélèvement maximal annuel de loups en France, aujourd’hui plafonné à 19 % de la population totale.
Quoi qu’il en soit, le futur plan prévoit une augmentation du taux de prélèvement sur la période 2024-2029 si l’évolution de la population lupine le permet (possibilité de passer à 20 ou 21 % de prélèvements en plafond).
Ces possibles déclassements et augmentation des abattages des loups ont fait bondir les six associations environnementales qui ont un siège au GNL* et expliquent en grande partie leur décision de quitter la réunion avant la fin. « Le loup reste en France une espèce vulnérable qui n’est pas en bon état de conservation et [qui n’est pas], et de loin, la principale menace qui pèse sur l’élevage ovin », rappellel’association Ferus, dans un communiqué.
Simplification des tirs, l’autre sujet de tension
Autre sujet de tensions : ce nouveau plan loup prévoit de faciliter les tirs de défense pour les éleveurs. « Aujourd’hui, à condition qu’il ait pris des mesures pour sécuriser son troupeau et si un loup est signalé à proximité, un éleveur peut demander un tir de défense simple pour défendre son troupeau d’éventuelles attaques, explique Claude Font. Mais ce “tir de défense simple” n’est accordé que pour un fusil, si bien que l’éleveur doit défendre son troupeau. » Le futur plan loup prévoit d’autoriser à l’avenir deux tireurs. Le préfet pourra même autoriser le recours à un troisième.
Par ailleurs, toujours dans cette optique de simplifier les tirs, les éleveurs et chasseurs pourront recourir à du matériel de vision nocturne. Les lieutenants de louveterie [des agents bénévoles de l’Etat] et agents de l’Office français de la biodiversité, assermentés, disposant de lunette à visée thermique n’auront plus non plus l’obligation d’éclairer préalablement « la cible ». Afin de rendre les louvetiers « plus disponibles », « plus mobiles » et « plus efficaces », il sera désigné par le préfet dans chaque département plusieurs louvetiers qui seront en charge spécifiquement de la gestion des tirs autorisés de loups.
Une nouvelle réunion en novembre
Le plan prévoit une meilleure prise en compte des dommages indirects subis par les éleveurs du fait des attaques (pertes génétiques, avortements, animaux disparus, etc.). Les éleveurs victimes seront indemnisés sous cent vingt-cinq jours. Un accompagnement leur sera proposé.
Les discussions doivent se poursuivre dans les prochaines semaines. « Il manque encore des détails pour de nombreuses mesures et on ne sait pas bien plus l’enveloppe financière exacte qui sera allouée dans le futur plan loup, reprend Claude Font. Il reste encore du boulot et le temps presse. » Une prochaine réunion du Groupe national loup est prévue en novembre. Pas sûr que les associations écologistes y figurent. « Nous avons annoncé notre retrait définitif du Groupe national loup », indique, ce lundi après-midi à l’AFP Jean-David Abel, représentant de France Nature Environnement (FNE) et porte-parole des six ONG ayant un siège au GNL. « Leur départ est regrettable. La porte reste ouverte et les contacts se poursuivront. Le processus de consultation va se poursuivre », a réagi la préfecture de la région Auvergne-Rhône-Alpes.